A travers ce cours, je vous propose une méthodologie pour aborder l’analyse territoriale d’un site, dans le cadre d’un projet urbain. L’analyse constitue une étape essentielle dans le processus de la conception urbaine et architecturale. Plus qu’une simple lecture du site, l’analyse permet de définir clairement les orientations premières du projet. Par la suite, vous verrez qu’il s’agit aussi d’un outil de rationalisation du projet et un outil de négociation entre les différents acteurs. Je vous conseille donc vivement de ne pas sauter cette étape dans l’écriture du projet.t
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L’analyse surpasse le stade de simple lecture du lieu de type descriptive, elle est avant tout d’ordre prospective, c’est à dire que l’on va analyser dans l’intention première de projeter. L’analyse permet donc de vérifier et d’affirmer certaines hypothèses de travail.
L’objectif de cette analyse est :
- D’identifier les caractère fondamentaux d’un territoire donné en terme de paysage, d’urbanisme et d’architecture ;
- de mettre en évidence les pièces constitutives de ce territoire ( ou les contenus de ce territoire) ;
- de montrer les évolutions du territoire ;
- de mettre en évidence les points forts à valoriser et les problèmes à corriger ( diagnostic)
- de définir les enjeux du projet urbain
- de conclure sur les premières orientations à envisager
Méthodologie : un processus en trois étapes : lire, comprendre, traduire
L’analyse consiste à repérer les « matériaux » du jeu », c’est à dire les limites, les relations et les contenus du territoire, de mettre en valeur les points forts et de diagnostiquer les points faibles. En d’autres termes nous décomposons le territoire en ses pièces maîtresses.
Lire (analyse)
Dans un premier temps il s’agira d’effectuer une lecture des échelles territoriales, urbaines et architecturales à travers différentes dimensions, que nous nommerons paysagère, historique, morphologique et analysé selon les limites, les relations et les contenus.
Ces trois niveaux de lecture permettent d’expliquer la causalité des limites, des relations et des contenus en présence et d’en dégager les principales caractéristiques. En abordant la lecture du territoire par ses limites, ses relations et ses contenus, nous avons déjà commencé à l’analyser.
Comprendre (enjeux, stratégie)
Dans un deuxième temps, il s’agira d’utiliser les bases de connaissances, la culture des lieux, les bases théoriques pour tirer profit de ces lectures et pour ne pas rester sur de la simple lecture mais pour se tourner vers une analyse prospective.
Traduire (projet urbain)
Dans un troisième temps montrer qu’à partir de ces éléments d’analyse (lecture, compréhension et théorie) on est capable d’en tirer les enjeux et les conclusions susceptibles de fonder une stratégie pour le projet urbain et architectural.
Eléments d’analyse territoriale
Plusieurs niveaux de lecture et d’analyse
La dimension paysagère
Il s’agit d’une dimension qui permet de cerner ce qui est originel, ce qui est d’ordre « mythique », en d’autre termes et pour citer le livre de Norberg Schulz, la dimension paysagère permet de cerner le Genius Loci du lieu ( le Génie du lieu).
La dimension paysagère permet d’entrevoir ce qui est existentiel (vérité), ce qui est donné dans un lieu avant les transformations de l’Homme.
La dimension historique
Au-delà de l’intérêt rétrospectif, la connaissance historique du phénomène urbain permet de réintégrer au sein de la ville tous les plis de la connaissance du passé.
La lecture historique scrute l’évolution des conceptions de l’espace, antique, médiéval, classique, industriel, et contemporain au fil du temps , elle nous renseigne sur le mode de croissance, dont l’étude s’avère selon la méthode d’analyse de Philippe Panerai, une étape importante de l’analyse urbaine, car elle offre une appréhension globale de l’agglomération dans une perspective dynamique et révèle les points fixes des transformations antérieures, et désigne les logiques profondément inscrites dans les territoires qui éclairent les enjeux des aménagements actuels .
Elle permet de comprendre la forme urbaine actuelle dans ce qu’elle exprime de son héritage historique, de retrouver des filiations avec les formes anciennes. En effet il est inutile de parler de forme urbaine si l’on ne sait pas ce qui la construit effectivement au risque de penser l’espace urbain comme scénographie du vide.
En s’interrogeant sur le pourquoi de telles configuration urbaine, on découvre un double horizon de causalités et de finalités : cet aménagement a telle forme parce qu’auparavant il y avait ceci et/ou parce qu’on voulait obtenir cela. En postulant l’intelligibilité de la forme urbaine dans ces termes, on fait de la ville un objet historique .
La compréhension de la forme urbaine rend possible l’expérimentation, a posteriori. Ainsi espère-t-on mieux assurer son évolution ultérieure. La ville offre à tout moment un potentiel de transformation qu’il s’agit d’exploiter le plus judicieusement possible .
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La morphologie des tracés urbains ou tracés de plans de ville est un instrument de composition urbaine indispensable, contribuant à la forme urbaine, (les tracés urbains représentant des tracés virtuels de composition).
Dans l’ouvrage qu’il consacre à la qualité de la forme urbaine A. Lévy rappelle : « De même que pour les tissus urbains, la notion de morphologie des tracés recouvre la manière dont les tracés reconnus sont distribués dans l’espace de la cité globale en fonction des différents stades de croissance urbaine et leurs modalités d’extension ».
D’où l’importance de la relation entre les types de tracés parcellaires (trame foncière) et bâtis (alignement/ implantation) qui devient essentielle à déterminer pour saisir le mécanisme de formation de la composition urbaine. De même la trame foncière confirme la cohérence du parcellaire, (il est possible de dessiner sa structure). Elle peut faire apparaître la part de géographie et celle d’histoire, en dispensant une compréhension approfondie du paysage.
La notion de tracés a évolué dans le temps. Aujourd’hui, sa définition ne se limite pas aux tracés traditionnels : le dessin des espaces libres (soit les axes ordonnateurs), mais elle s’est étendue à tous les types possibles de tracés : parcellaires, viaires, bâti intervenant dans la composition urbaine et permettant de comprendre et d’en concevoir la forme...Eux-mêmes ont varié suivant les époques de réalisation et les transformations dont ils ont été l’objet. Ces tracés s’offrent comme des potentialités pour amorcer et favoriser l’évolution de la cité.
Plusieurs échelles de lecture et d’analyse
Le territoire réunit principalement trois échelles : l’échelle territoriale, urbaine et architecturale. Une lecture du territoire à travers ces trois échelles permet d’identifier ce qui est de l’ordre du territoire, de l’urbain ou de l’architecture, et surtout il permet de comprendre comment s’articule ces trois échelles.
L’échelle territoriale
L’échelle territoriale met en corrélation les échelles urbaines et est surtout liée à l’espace du Champ de vision et de la locomotion.
L’échelle urbaine
L’échelle urbaine met en corrélation les échelles architecturales et est surtout liée à l’espace de l’action et de la locomotion.
S. Czarnowski : « Remarquons d’abord que tout morcellement, c’est à dire toute division de l’étendue en territoires ou en parcelles de quelque chose que ce soit, est accompagné d’une séparation efficace. J’entends par là qu’il entraîne nécessairement la reconnaissance ou le tracement d’une limite, qu’on se représente être réelle, infranchissable en principe, et en principe qu’on ne peut franchir qu’en se conformant à des conditions précises. »
L’échelle architecturale
L’échelle architecturale met en corrélation les échelles humaines et est surtout liée à l’espace d’expérience. A cette échelle, l’homme est confronté à son espace d’expérience.
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L’analyse est une étape clé du projet urbain. Elle consiste avant tout à mettre en place une méthodologie de lecture et de compréhension des territoires, afin de définir un diagnostic puis les enjeux du projet. L’analyse, plus qu’une étape est le premier accomplissement du projet.